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a cell phone sitting on top of a laptop computer
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La meilleure personne pour aider un humain, c’est un autre humain”

Patrice Larin, directeur général du Centre de prévention du suicide Accalmie.

Par Marie-Eve B. Alarie

10 septembre 2025, 5 h Le Courrier du Sud

Au Centre de prévention du suicide L’Accalmie, on s’inquiète de voir que de plus en plus de Québécois se tournent vers les outils d’intelligence artificielle (IA) pour parler de leur détresse et de leurs problèmes de santé mentale, car cette façon de faire comporte des dangers.

La semaine dernière, La Presse dévoilait le résultat de son expérience qui consistait à tester quatre robots conversationnels pour voir comment ils conseilleraient une adolescente aux prises avec des idées suicidaires. Après avoir reformulé un peu les requêtes initiales pour lesquelles les robots suggéraient des ressources spécialisées, “la plupart des robots ont ensuite détaillé diverses manières de se donner la mort”, mentionne l’article.

Des cas ont d’ailleurs été recensés aux États-Unis où des personnes se sont donné la mort après avoir échangé des idées suicidaires avec des robots conversationnels.

“Les applications IA ne sont pas conçues pour mener des interventions en situation de crise. Les confondre avec une solution d’intervention serait une grave erreur, insiste Patrice Larin, directeur général du Centre de prévention du suicide Accalmie. Ça ne considère pas le non-verbal. De notre côté, on travaille aussi avec le non-verbal et on forme nos intervenants en ce sens. Ça peut être dans l’intonation de la voix, le débit, le rythme et même les bruits ambiants. Un être humain, c’est complexe. Il faut rappeler aux gens que l’intelligence artificielle ne se substitue en rien à une intervention en direct avec un humain. On prend les appels en direct. Il n’y a pas d’attente. Au final, la meilleure personne pour aider un humain, c’est un autre humain.”

“Une autre chose me préoccupe aussi avec l’intelligence artificielle. Il s’agit d’algorithmes et des millions de facteurs sont pris en compte. Mais derrière tout ça, ce sont des business. L’IA ne te confrontera pas. Il va plutôt te conforter dans tes positions. En intervention, on ne cherche pas à faire plaisir, mais plutôt à offrir de l’aide pour répondre à la détresse. L’IA n’a pas été conçue pour offrir des services de relation d’aide, quels qu’ils soient”, précise M. Larin.

Parler du suicide

La Journée mondiale de prévention du suicide a lieu chaque année le 10 septembre pour attirer l’attention sur les problèmes du suicide dans le monde entier. Selon le Regroupement des centres de prévention du suicide du Québec, contrairement à ce que l’on pourrait penser, parler du suicide avec une personne qui nous inquiète n’incite pas cette dernière à passer à l’acte.

“À l’inverse, ça montre qu’on s’intéresse à la personne, qu’on ne veut pas la voir souffrir. Poser la question pour savoir si un proche qui semble vivre de la détresse a des idées suicidaires, c’est un pas vers la possibilité de lui venir en aide”, souligne Patrice Larin.

Il est normal de ne pas être à l’aise de recevoir ce type de confidence de la part d’un proche et de ne pas savoir comment réagir. Le Centre de prévention du suicide Accalmie encourage les gens à faire appel à ses services pour obtenir du soutien.

“On offre des services aux gens qui vivent de la détresse, mais aussi à leurs proches, tout comme aux endeuillés par le suicide, indique M. Larin. Si un proche ne sait pas comment aborder le sujet, on peut donner des trucs. Quand ça devient trop lourd, on peut également prendre le relais et parler à la personne. On ne veut pas que le proche se retrouve envahi par trop d’émotions ou encore d’un sentiment de responsabilité ou de culpabilité.”

Depuis la pandémie, l’organisme assiste à une augmentation de 33% du volume d’appels. “On arrive avec une génération plus sensible qui accepte davantage la relation d’aide, fait remarquer le directeur général de L’Accalmie. La pandémie a amené son lot de stress et d’anxiété. On constate aussi que nos services sont mieux connus et utilisés. Sur le plan national, le taux de suicide demeure stable. C’est important de continuer à encourager les gens à demander de l’aide”, conclut-il.

Si vous vivez un moment difficile ou si vous êtes inquiets pour un proche, plusieurs ressources sont disponibles 7 jours sur 7, 24 heures sur 24:

  • 1 866 APPELLE (1 866 277-3553)

  • Plateforme d’information et de clavardage en ligne: suicide.ca

  • Info-Social: 811, option 2

  • Jeunesse, j’écoute (1 800 668-6868) ou Tel-Jeunes (1 800 263-2266)

  • Ligne téléphonique pour les communautés autochtones: 1 855 242-3310

  • L’aide par SMS au 535353

L'intelligence artificielle vs aide psychologique